Instantané N° 22 mai 2006
Kératines du cheveu
Souples, frisés ou raides comme des baguettes, les cheveux se déclinent sous diverses formes. Trop lisses ou trop rebelles ? Qu’à cela ne tienne. Permanente, brushing ou laque, les moyens ne manquent pas pour sculpter la chevelure et satisfaire la fantaisie de chacun. La docilité de ces quelque 120'000 brins volant au vent tient essentiellement à la structure des kératines, une grande famille de protéines.
Le cheveu naît dans un bulbe, à quelques millimètres sous la peau. Il est à ce stade constitué de cellules qui s’enrichissent en kératines, puis qui s’allongent et meurent. Restent alors principalement des faisceaux de kératines. Il existe deux types de ces protéines. Et c’est en fait l’enroulement de deux molécules de type I et de deux molécules de type II sur elles-mêmes qui forment les longues torsades accumulées dans le cheveu.
L’architecture des cheveux repose sur des liaisons qui se font et se défont entre les kératines. Lesdites protéines interagissent entre elles, au gré des attractions qui rapprochent les atomes d’hydrogène d’une kératine vers une autre. Ces fragiles liaisons peuvent être rompues par l’eau ou simplement de l’humidité. Lorsque le cheveu sèche, de nouvelles liaisons se construisent et stabilisent la forme du cheveu prise à cet instant. C’est typiquement le cas lorsque l’on se couche les cheveux encore humides et se réveille le lendemain avec un épi sur la tête ! A l’opposé, le brushing réordonne ces attractions et imprime une forme particulière aux cheveux jusqu’à ce qu’on les mouille à nouveau.
En plus des liaisons hydrogènes, les kératines établissent également des interactions très stables avec leurs voisines. Elles les doivent à un acide aminé particulier, la cystéine qui porte un atome de soufre. Le face-à-face de deux cystéines, et donc de deux atomes de soufre, conduit à la formation de liaisons très solides. Pour les casser, l’eau reste impuissante et il faut avoir recours cette fois à des composés chimiques. Dès les liaisons de soufre brisées, les torsades de kératines deviennent malléables. Il est alors possible de friser une chevelure raide ou inversement.
Une question demeure. Pourquoi certains d’entre nous naissent-ils avec les cheveux frisés et d’autres avec les cheveux raides ? Les kératines ont été mises sur ce point hors de cause. C’est le bulbe où est fabriqué le cheveu qui détient la réponse. Un bulbe cylindrique donnera naissance à un cheveu rond et raide tandis qu’un bulbe incurvé produira un cheveu aplati. On imagine en effet aisément qu'un ruban plat s'enroule plus facilement sur lui-même qu'une cordelette cylindrique.
Si la "mode capillaire" est éphémère, les cheveux sont pour ainsi dire immortels. Ils peuvent traverser des millénaires pour nous révéler, par exemple, que le pharaon Ramsès II était roux. Par ailleurs, les cheveux trahissent bien des choses : une habitude alimentaire, un comportement toxicologique ou un empoisonnement. Finalement, certaines vérités ne tiennent qu’à un cheveu…
- Keratin, type I cuticular Ha1, Homo sapiens (humain): Q15323
- Keratin, type I cuticular Ha2, Homo sapiens (humain): Q14532
- Keratin, type I cuticular Ha4, Homo sapiens (humain): O76011
- Keratin, type I cuticular Ha5, Homo sapiens (humain): Q92764
- Keratin, type I cuticular Ha6, Homo sapiens (humain): O76013
- Keratin, type I cuticular Ha7, Homo sapiens (humain): O76014
- Keratin, type I cuticular Ha8, Homo sapiens (humain): O76015
- Keratin, type I cuticular Ha3-I, Homo sapiens (humain): O76009
- Keratin, type I cuticular Ha3-II, Homo sapiens (humain): Q14525
- Keratin, type II cuticular Hb1, Homo sapiens (humain): Q14533
- Keratin, type II cuticular Hb2, Homo sapiens (humain): Q9NSB4
- Keratin, type II cuticular Hb3, Homo sapiens (humain): P78385
- Keratin, type II cuticular Hb4, Homo sapiens (humain): Q9NSB2
- Keratin, type II cuticular Hb5, Homo sapiens (humain): P78386
- Keratin, type II cuticular Hb6, Homo sapiens (humain): O43790