Instantané N° 8 mars 2005
Semidwarf-1
Lorsque Gregor Mendel (1822-1884) a défini des critères rigoureux pour sélectionner les petits pois grâce auxquels il allait établir les lois de l’hérédité, il était loin d’imaginer que l’un d’entre eux, la taille, serait un des acteurs majeurs de la révolution verte des années soixante.
Le terme ‘révolution verte’ désigne le bond technologique réalisé en agriculture dans le but d'accompagner la hausse constante de la population, selon la devise ‘plus de riz pour plus de bouches’. Au cœur de cette révolution, on trouve une variété naine de riz, issue de croisements. Non seulement cette plante de petite taille produit plus de grains, mais elle est aussi moins encline à se coucher lors d’intempéries – ce qui est toujours un problème lors de la moisson – et répond mieux aux engrais azotés. Sa culture a permis de doubler la production de riz et ce, en quelques décennies seulement.
En 2002, des chercheurs ont découvert la molécule impliquée dans ce type de nanisme : la ‘gibberelline 20 oxydase 2’ ou la protéine ‘semidwarf-1’ – bien nommée, puisqu’en anglais ‘dwarf ‘ signifie ‘nain’. Le riz – comme tout être vivant – a besoin d’hormones pour croître. Si la synthèse de l’hormone de croissance est interrompue, c’est tout le développement qui s’en trouve affecté. Or la gibberelline 20 oxydase 2 est une enzyme-clé dans la biosynthèse de la gibberelline, une hormone de croissance végétale. Lorsque cette enzyme est déficiente, la production de gibberelline diminue et le riz n’atteint pas sa taille normale.
D’autres protéines sont impliquées dans la biosynthèse de la gibberelline et leur inactivation a un effet semblable à celui obtenu avec la protéine semidwarf-1 au niveau de la synthèse de l’hormone. Cependant celles-ci, dans leur forme mutée, affectent aussi la floraison et les fleurs sont stériles. Dans le cas de sd1, les fleurs de la plante peuvent se développer et être fécondées normalement car la sd1 n’entrave pas la fonction d’une deuxième protéine, la gibberelline 20 oxidase 1, qui a aussi un rôle clé dans la synthèse de l’hormone de croissance et qui elle est exprimée dans les tissus reproductifs de la plante. La fécondation peut donc se faire dans les règles de l’art, ce qui est une caractéristique idéale si l’on veut que la plante ait une descendance.
L’étape suivante est de trouver le moyen de manipuler la synthèse de la gibberelline dans d’autres plantes de culture afin de contrôler leur croissance et, avec un peu de chance, augmenter leur production. Nous sommes bien loin de l’approche de Mendel, mais depuis lors, la population a plus que doublé et l’humanité doit faire face à un nouveau défi, celui de nourrir 6 milliards d’individus…